L’importance de s’investir

On n’apprend pas que sur les bancs d’école : songez aux applications concrètes des notions apprises

Nicole Li-Jessen est professeure adjointe au programme d’orthophonie de l’École des sciences de la communication humaine et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en médecine personnalisée des troubles de la voix. Entretien avec la lauréate 2018 du Prix de la principale pour l’excellence en enseignement (catégorie Professeur adjoint), qui nous parle de la pédagogie à McGill et des particularités de notre milieu d’enseignement par rapport à celui de Hong Kong et des États-Unis, où elle a étudié.

Quels sont les meilleurs côtés du métier de professeur?

Nicole Li-Jessen : Quels acquis puis-je laisser à mes diplômés? La réponse à cette question est au cœur de ma philosophie d’enseignement. Notre programme de maîtrise en orthophonie est une formation professionnelle intensive de deux ans. J’y donne trois cours. À l’aube de la première session, je ressens toujours la même incertitude teintée d’angoisse que vivent un bon nombre d'étudiants. Vers la fin du programme, les étudiants ne sont plus les mêmes : ils sont plus confiants et doués dans leur travail auprès des clients. C’est toujours gratifiant de voir à quel point ils ont grandi et surmonté des obstacles en si peu de temps. J’ai l’impression de redonner à la société ce qu’elle m’a donné pendant de nombreuses années. C’est ce que je préfère de mon métier.

Quels sont les plus gros défis à relever?

Jessen : Compte tenu des contraintes de temps, c’est difficile d’aider les étudiants à passer de l’étape de l’acquisition du savoir à celle de la mise en application, voire de la création de connaissances. Je conçois donc des cours qui conjuguent la théorie, la pratique et l’engagement communautaire, tout en inculquant le goût de la recherche.

Comment tissez-vous des liens forts avec vos étudiants?

Jessen : Je crois que l’empathie est le mot d’ordre. Si on avait tous un peu plus d’empathie pour les gens qui nous entourent, on vivrait dans un monde meilleur.

Les technologies de l’information bouleversent-elles l’enseignement?

Jessen : Sans l’ombre d’un doute. Le Service de soutien pédagogique de McGill m’aide beaucoup à intégrer les TI dans mes cours, par exemple en mettant au point des modules d’autoapprentissage en ligne. Grâce aux TI, je peux maintenant proposer des activités plus interactives en classe, comme des études de cas et des exercices pratiques.

Quel conseil donneriez-vous à vos étudiants pour qu’ils tirent le maximum de vos cours?

Jessen : Je leur dirais : « Investissez-vous le plus possible. Continuez d’explorer votre potentiel ». Je crois que chaque étudiant est unique. Comme professeure, mon rôle premier est de découvrir les talents uniques de chacun et de l’aider à atteindre son plein potentiel.

Et n’hésitez pas à poser des questions. Tout comme moi, les professeurs trouvent souvent que les questions sont plus instructives que les réponses.

Vos travaux sur l’utilisation de technologies informatiques visant à mettre au point des traitements personnalisés pour les lésions aux cordes vocales ont retenu l’attention sur la scène internationale. Comment conciliez-vous enseignement et recherche?

Jessen : L’enseignement et la recherche sont intimement liés. La recherche synthétise les nouvelles connaissances à la base de la matière enseignée. L’enseignement incite les étudiants à réfléchir et à remettre en question les hypothèses, les méthodologies et les notions existantes, ouvrant ainsi la voie à de nouveaux axes de recherche. Souvent, l’idée d’un nouveau projet de recherche me vient d’une question astucieuse posée par un étudiant.

En ce sens, je n’ai pas vraiment de mal à concilier les deux. Je vois la recherche comme un volet de l’enseignement, et vice versa. Et surtout, j’adore enseigner.

Notre voix est une chose qu’on tient souvent pour acquise, sauf en cas d’enrouement ou de mal de gorge. D’où vient cet intérêt pour ce domaine de recherche?

Jessen : Je dirige le Laboratoire de recherche sur la voix et les voies aériennes supérieures de McGill. J’ai toujours été intriguée par le larynx, un organe qui joue un rôle crucial dans la respiration, le voisement et la déglutition.

La laryngologie est un créneau de recherche, ce qui signifie qu’il reste énormément de mystères scientifiques à élucider. Chaque occasion comporte son lot de difficultés, mais l’inverse est aussi vrai. C’est ce qui rend ce domaine si passionnant.

Vous avez fait votre premier cycle à Hong Kong et vos études doctorales et postdoctorales aux États-Unis. Quelles sont les particularités du milieu d’apprentissage mcgillois?

Jessen : Le système d’éducation et la culture d’apprentissage de Hong Kong résultent d’un amalgame des modèles britannique et asiatique; ils diffèrent grandement du système américain. Je trouve que McGill est un mélange bien dosé de tous les ingrédients. Le campus est plus dynamique et inclusif que bien d’autres ailleurs. Les étudiants et les professeurs viennent de tous les horizons, même s’il est toujours possible de faire mieux sur ce front, bien entendu. De nombreux cours sont interdépartementaux, ce qui est primordial pour préparer les étudiants à l’heure où la société et les technologies évoluent à la vitesse grand V.

Ce qui m’étonne en classe, c’est que les étudiants posent toujours plus de questions que moi. Et la plupart d’entre elles sont excellentes. Ce n’était pas comme ça dans les autres universités où j’ai étudié et enseigné, ce qui témoigne de la grande curiosité de nos brillants étudiants.

Qu’aimez-vous le plus de votre vie à Montréal?

Jessen : Ce sont les gens qui font les belles villes. Ce que j’aime le plus, ce sont les personnes extrêmement gentilles et aimables que j’ai la chance de côtoyer tous les jours : mes étudiants, mes collègues et, bien sûr, mon superhéros de mari.

En terminant, auriez-vous quelque chose à dire aux étudiants qui songent à s’inscrire à McGill?

Jessen :

  • Soyez ouverts et carburez aux nouveaux défis. Certaines matières sont parfois moins passionnantes, mais on ne sait jamais : on peut tomber amoureux d’une discipline, et les connaissances et les compétences acquises en classe peuvent ouvrir des débouchés inattendus.
  • D’ailleurs, on n’apprend pas que sur les bancs d’école. Faites partie intégrante de la communauté et songez aux applications concrètes de ce que vous apprenez.
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