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Cartographier la consommation internationale de drogues grâce aux eaux usées

Publié: 23 October 2019

L’épidémiologie fondée sur les eaux usées est une discipline scientifique en plein essor qui permet de surveiller en temps quasi réel les tendances de consommation de drogues illicites d’une population. En prélevant un échantillon d’une source connue d’eaux usées, telle qu’une conduite d’égouts alimentant une station de traitement des eaux usées, les scientifiques, y compris ceux de McGill, sont capables d’évaluer la quantité de drogues consommée par une population à partir des niveaux de drogues illicites mesurés et des métabolites présents dans l’urine. Les résultats des campagnes de surveillance annuelles menées entre 2011 et 2017 à travers le monde par un groupe de scientifiques internationaux, le groupe SCORE [Sewage analysis CORe group Europe (Groupe central d’analyse des eaux usées en Europe)], sont maintenant compilés dans un article paru dans la prestigieuse revue Addiction.

Données sur la consommation de dogues dans 37 pays

Au total, les eaux usées de plus de 60 millions de personnes, soit les habitants de 120 villes réparties dans 37 pays, ont été analysées au moins une fois sur une période d’une semaine afin d’observer les tendances de consommation de quatre substances illicites (amphétamine, méthamphétamine, ecstasy, cocaïne) de la population selon les zones. Au Canada, deux villes québécoises, Montréal et Granby, ont été étudiées et ont contribué à l’élaboration d’un ensemble de données de base, ce qui a permis aux scientifiques d’évaluer les tendances temporelles des comportements de consommation de drogues.

Selon Viviane Yargeau, du Département de génie chimique de l’Université McGill, « la participation au projet du SCORE a permis de collaborer à l’élaboration de pratiques exemplaires pour la mise en œuvre de l’épidémiologie fondée sur les eaux usées, ainsi qu’à la constitution d’un ensemble de données internationales sur les tendances géographiques et temporelles de consommation de drogues. L’expertise développée a également joué un rôle déterminant dans la conception et la réalisation du projet pilote sur la surveillance de la consommation de drogues par l’analyse des eaux usées lancé par Statistique Canada en mars 2018 et visant à recueillir des données supplémentaires dans le contexte de la légalisation du cannabis ».

À chaque pays ses habitudes de consommation

Les résultats confirment qu’il existe d’importantes disparités dans la consommation de drogues à travers le monde :

  • La méthamphétamine dominait le paysage des drogues dans les villes étudiées en Amérique du Nord (États-Unis et Canada) et en Australasie (Australie, Nouvelle-Zélande et Corée du Sud). Les niveaux moyens dépassaient d’ailleurs largement ceux observés en Europe de l’Est.
  • Pour Granby et Montréal, la consommation se situait généralement autour ou en dessous de la moyenne de toutes les villes ayant fait l’objet de l’étude, à l’exception de la méthamphétamine pour laquelle les deux villes comptaient parmi les plus grandes consommatrices.
  • En Europe, la consommation de méthamphétamine, bien que relativement faible comparativement à celle d’autres stimulants, enregistrait des pics localisés dans certaines villes de l’est (en Slovaquie, en République tchèque et dans l’est de l’Allemagne), tendance qui gagnait progressivement le nord et le centre du continent.
  • La cocaïne dominait le scénario des drogues consommées dans les villes du sud et de l’ouest du continent (Suisse, Italie, France, Espagne et Royaume-Uni) et les niveaux observés ont connu une forte hausse entre 2011 et 2017 dans la plupart des villes étudiées.
  • La Belgique et les Pays-Bas ont également accusé une consommation importante de cocaïne et de méthamphétamine, substance dont la consommation a également bondi dans de nombreux pays d’Europe du Nord.
  • En Amérique du Sud (Colombie et Martinique), la consommation de cocaïne était plus répandue que celle des trois autres substances. Dans ce cas, aucune tendance temporelle n’a pu être décelée en raison de l’ajout récent de sites non européens aux campagnes internationales de surveillance.
  • Bien que l’ecstasy ne domine aucun scénario, sa consommation a néanmoins augmenté au cours de la période 2011-2017 dans la plupart des villes où elle a été observée.

La correspondance entre les résultats de la consommation de drogues tirés de l’analyse des eaux usées et des indicateurs épidémiologiques établis (p. ex. : les données sur la prévalence ou les statistiques sur les saisies de drogues) démontre le potentiel de l’analyse des eaux usées comme indicateur supplémentaire et complémentaire des tendances de consommation de drogues. Cette discipline met en exergue les tendances de consommation de drogues illicites d’une population donnée en temps quasi réel, ce qui permet de repérer les nouvelles tendances beaucoup plus tôt qu’avec d’autres méthodes.

L’article « Spatio-temporal assessment of illicit drug use at large scale: evidence from 7 years of international wastewater monitoring », par Iria González-Mariño et coll., a été publié dans la revue Addiction. https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/add.14767

L’Université McGill

Fondée à Montréal, au Québec, en 1821, l’Université McGill est l’un des établissements d’enseignement supérieur les plus prestigieux du Canada. Elle compte deux campus, 11 facultés, 13 écoles professionnelles, 300 programmes d’études et plus de 40 000 étudiants, dont au-delà de 10 200 aux cycles supérieurs. McGill accueille des étudiants originaires de plus de 150 pays, ses 12 800 étudiants internationaux représentant 31 pour cent de sa population étudiante. Plus de la moitié des étudiants mcgillois ont une langue maternelle autre que l’anglais, et la langue maternelle d’environ 19 pour cent d’entre eux est le français.

Personne-ressource :

Katherine Gombay

Service des relations avec les médias, Université McGill

514 398-2189

Katherine.gombay [at] mcgill.ca

 

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