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Approvisionnement en eau dans les grandes villes

La première base mondiale de données sur les sources d’eau des grandes villes révèle que les bassins hydrographiques qui les alimentent couvrent 41 % de la superficie des terres émergées de la planète

À l’heure où un nombre sans cesse croissant de personnes s’établissent en milieu urbain, les villes de toutes les régions du monde connaissent des problèmes d’approvisionnement en eau et cherchent de nouvelles sources pour soutenir leur croissance.

Publié: 3 June 2014

Selon les estimations de la première base mondiale de données sur les sources d’eau et le stress hydrique en milieu urbain, parues cette semaine dans la publication Global Environmental Change, les villes déplacent 504 milliards de litres d’eau sur une distance de 27 000 kilomètres chaque jour. Mis bout à bout, ces canalisations et tuyaux traverseraient la moitié de la circonférence de la Terre. Comme les grandes villes n’occupent qu’un pour cent de la superficie des terres émergées de la planète et que les bassins hydrographiques qui les alimentent couvrent 41 % de cette surface, la qualité de l’eau brute dont elles ont besoin est tributaire de l’utilisation des terres sur cette surface beaucoup plus vaste.

Une équipe internationale de chercheurs de neuf institutions, dont l’Université McGill, à Montréal, a étudié et cartographié les sources d’alimentation en eau de plus de 500 villes, permettant ainsi pour la première fois d’avoir un aperçu des infrastructures hydrauliques mondiales qui desservent les plus grandes villes de la planète. Cette étude a été dirigée par Rob McDonald, maître de recherche auprès de la Nature Conservancy à Arlington, en Virginie.

Le professeur Bernhard Lehner et le doctorant Günther Grill, du Département de géographie de l’Université McGill, ont fourni une carte du monde détaillée des fleuves, des lacs et des bassins hydrographiques permettant de cartographier les sources d’approvisionnement en eau de chaque ville, tandis que le professeur Thomas Gleeson, du Département de génie civil de McGill, a réalisé une analyse des nappes phréatiques.

L’équipe de chercheurs a eu recours à des modèles informatiques afin d’estimer l’utilisation des eaux en fonction de la population et des types d’industrie pour chaque ville, et défini les villes soumises à un stress hydrique comme étant celles utilisant au moins 40 % de l’eau disponible. Les estimations précédentes relativement au stress hydrique reposaient uniquement sur le bassin hydrographique de chaque ville, mais de nombreuses municipalités puisent largement dans des bassins situés bien au-delà de leurs frontières. En fait, en 2010, les 20 plus importants transferts d’eau entre bassins totalisaient au-delà de 42 milliards de litres d’eau par jour, soit l’équivalent du volume de 16 800 piscines olympiques.

Ces résultats sont porteurs d’une bonne nouvelle, puisque de nombreuses villes ne connaissent pas de problèmes d’approvisionnement en eau aussi criants qu’on le croyait. Ainsi, des analyses précédentes estimaient à 40 % environ le nombre de villes soumises à un stress hydrique, alors que cette nouvelle étude réduit cette proportion à 25 %.

Selon les résultats de l’étude, les dix plus grandes villes aux prises avec des problèmes d’approvisionnement en eau sont Tokyo, Delhi, Mexico, Shanghai, Beijing, Calcutta, Karachi, Los Angeles, Rio de Janeiro et Moscou. Aucune des deux villes canadiennes analysées, soit Toronto et Montréal, n’est soumise à un stress hydrique selon la définition utilisée par les chercheurs.

L’étude permet également de comprendre que les ressources financières et les ressources hydriques sont étroitement liées. Une ville peut se développer malgré la rareté de l’eau ‒ soit en pompant l’eau sur des distances de plus en plus grandes, soit en investissant dans des technologies comme le dessalement ‒, mais un grand nombre de villes qui connaissent un essor rapide sont également soumises à un stress économique et peuvent difficilement assurer un approvisionnement suffisant en eau à leurs citoyens sans recourir à l’aide et aux investissements internationaux.

« À l’instar des plantes profondément enracinées, les villes peuvent composer avec une distance assez grande pour trouver l’eau dont elles ont besoin, affirme Rob McDonald. Toutefois, les villes les plus pauvres doivent s’engager dans une véritable course contre la montre pour construire les infrastructures hydrauliques leur permettant de répondre aux besoins de leur population sans cesse croissante. »

Voici d’autres conclusions de l’étude :

•           Dans les grandes villes, quatre citadins sur cinq (78 % ou quelque 1,21 milliard de personnes) dépendent principalement des eaux de surface. Les autres dépendent des eaux souterraines (20 %) ou, rarement, du dessalement (2 %).

•           Les infrastructures hydrauliques des grandes villes fournissent conjointement 668 milliards de litres d’eau chaque jour. De ce nombre, 504 milliards proviennent des eaux de surface et sont acheminés sur une distance totale de 27 000 kilomètres.

•           L’utilisation des terres dans les surfaces contributives en amont a une incidence sur la qualité et la quantité de l’eau brute provenant de sources de surface.

•           Environ le quart des grandes villes qui connaissent des problèmes d’approvisionnement en eau représentent une activité économique de l’ordre de 4,8 trillions de dollars, soit 22 % de l’activité économique des grandes villes à l’échelle mondiale. Cette activité économique dans les grandes villes soumises à un stress hydrique vient souligner l’importance d’assurer la gestion durable de ces sources, tant pour la viabilité des villes que pour l’économie mondiale.

Ces travaux ont été financés par une subvention de la Fondation Gordon et Betty Moore.

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Water on an urban planet: urbanization and the reach of urban water infrastructure, Robert. I. McDonald et coll., Global Environmental Change, publié en ligne le 2 juin 2014. http://dx.doi.org/10.1016/j.gloenvcha.2014.04.022

 

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