Intronisation du Dr Nicolas Mateesco Matte au Panthéon de l’Air et de l’Espace de la Fondation Aérovision Québec
Depuis 2001, la Fondation Aérovision Québec met en valeur les pionniers du Québec dans le domaine aérospatial par le biais de son musée virtuel, ses nombreuses conférences et activités éducatives. Depuis 10 ans, la Fondation honore annuellement des individus ou groupe d’individus qui ont contribué de manière exceptionnelle à l’essor de l’aéronautique et les intronise à son Panthéon de l’Air et de l’Espace.
C’est ainsi que le 10 juin 2022, Dr Nicolas Mateesco Matte, ancien directeur émérite de l’Institut de droit aérien et spatial de l’université McGill (IDAS 1975-1989) a reçu cet insigne honneur lors d’un gala festif à l’aéroport de St-Hubert, dans le hangar Hub FBO jalonné d’avions et en présence de cadets de l’air.
Le gala a eu lieu sous la présidence d’honneur de Gilles Ouimet (ancien PDG de Pratt et Whitney) et du président du CA de la Fondation Aérovision Québec, Marc Tremblay (ancien Officier ingénieur en aéronautique pour l’armée de l’air), en présence également des lauréats suivants : Gérard Burnett cofondateur de Matane Air Services, Gilles Labbé PDG de Héroux-Devtek, Marc Parent PDG de CAE, pilotes Stéphane Barrette et Tommy Grenier ainsi que l’astronaute québécois, David Saint-Jacques.
Lors de la cérémonie de remise de prix Anne-Karyne Matte, fille de Dr Matte, Ram Jakhu, alors directeur par intérim de l’Institut de droit aérien et spatial (IDAS) de l’université McGill, Juan Carlos Salazar, secrétaire général de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) et diplomé de l’IDAS ainsi que Doreen Assaad, mairesse de Ville de Brossard, ont souligné chacun un volet particulier de sa carrière ainsi que son humanisme, sa lucidité et son optimisme.
En plus du gendre de Dr Matte, Jacques Latreille et de ses petits-fils, Jordan-Nicolas et Mikaël-Darcy Matte, d’anciens étudiants et collègues de Dr Matte ont représenté les divers lieux et époques de sa carrière, du plus jeune, Stefan-Michael Wedenig, doctorant à l'IDAS au plus senior, Serge Lefebvre, président en 1962 du Club de Relations Internationales (CRI) de l'Université de Montréal.
Au cours de sa carrière, Nicolas Mateesco Matte a exercé à titre de juriste, de professeur, d’homme d’affaires, de consul honoraire mais surtout en tant qu’académicien et chercheur de renommée mondiale dans le domaine aérien et spatial. L’ensemble de ses fonctions de même qu’une prodigieuse bibliographie dans les deux langues officielles lui ont valu l’Ordre du Canada, l’Ordre national du Québec ainsi que la plus haute distinction de l’OACI, soit le prix Edward Warner et maintenant l’intronisation au Panthéon de l’Air et de l’Espace.
Nicolas Mateesco Matte est naît en 1913 à Craiova en Roumanie et a obtenu son premier doctorat en droit à l’Université de Bucarest. Après la Seconde Guerre mondiale en 1946, son épouse, Monica Bünger Berzeanu, et lui se sont installés à Paris. Lors de son doctorat en droit international à Paris et influencé par de grandes maîtres de la Cour internationale de Justice, il a vu la nécessité pour un nouvel ordre juridique. Avec les nouveaux moyens de transport et les communications de plus en plus rapides, le monde se rétrécissait, donnant lieu à une interdépendance grandissante des nations tant sur le plan politique, social, économique, culturel et psychologique. Il a publié plusieurs livres dont le Droit international nouveau. Il a proposé alors la coopération des États transcendant les frontières géopolitiques, une vision présentée à la 3e assemblée générale des Nations Unies.
Avec la montée du communisme en Europe, Nicolas Matte et son épouse ont émigré au Québec en 1950. Il a entrepris sa carrière de professeur à l’Université de Montréal où il a créé la chaire du droit aérien puis, visionnaire, il a ajouté le droit spatial dès 1958, soit 11 ans avant les premiers pas sur la lune de Neil Armstrong et Buzz Aldrin en 1969. Il publiera, d’ailleurs, au cours de cette même année son premier volume du Droit spatial.
Pendant plus de 50 ans, Nicolas Matte a animé le réputé CRI de l'Université de Montréal. Par le biais de conférenciers de renommée et de visites d’organismes comme les Nations Unies à New York, les étudiants ont reçu une formation aux politiques et aux problématiques internationales. Le club était un terreau fertile dans l’émergence d’une élite dirigeante du Québec moderne. Parmi les anciens membres, on retrouve des premiers ministres du Canada et du Québec, soit Pierre Elliott Trudeau, Robert Bourassa, René Lévesque, Bernard Landry, Daniel et Pierre-Marc Johnson.
Ardent défenseur de la langue française, il s’est fait un devoir de publier en français ou dans les deux langues. Il a été également l’un des cinq commissaires de la Commission Gendron qui a recommandé, en 1972, le français comme langue officielle du Québec, tout en respectant les droits des minorités. Il souhaitait une présence forte du Québec au sein de la Confédération canadienne et de la communauté internationale.
En tant qu’homme d’affaires et avocat, Nicolas Matte a pressenti le potentiel de développement de la Ville de Brossard à la fin des années 50. D’aucuns doutaient qu’on puisse intéresser des investisseurs envers une nouvelle ville de l’autre côté du fleuve Saint-Laurent avant que toute l’île de Montréal ne soit occupée. Il en deviendra par ailleurs le premier citoyen d’honneur de la ville et un boulevard porte son nom.
En 1975, il dirige l’IDAS de l’Université McGill. Il a fondé alors le Centre de recherche et lance les Annales de droit aérien et spatial, la publication phare de l’institut, la seule en son genre publiée en français et en anglais.
Ses œuvres se caractérisaient par son approche pragmatique, multidisciplinaire et interdisciplinaire alliant le droit à l’économie, à l’ingénierie, à la biologie et à l’astronomie. Il visait avant tout à arrimer ses encadrements juridiques de l’air et de l’espace à une sphère d’activité en constante mutation en plus de fournir aux États les moyens de prévenir de potentiels conflits. Des projets de grande envergure ont été menés sur le contrôle des armements dans l’espace et sur la réglementation des télécommunications par satellites.
Nicolas Matte a cofondé en 1994 le Cosmodôme de Laval, seul établissement canadien consacré à la diffusion des sciences de l’espace auprès du grand public.
Il a achevé sa carrière à l’âge de 95 ans comme avocat-conseil et mentor auprès de ses collègues du cabinet BCF à Montréal.
Comme l’a mentionné M. Salazar, secrétaire général de l’OACI, lors de son allocution au gala de l’intronisation au Panthéon de l’air et de l’espace: “ Au cours d’une longue et brillante carrière, le professeur Mateesco Matte a contribué à la formation de générations de juristes. Mais il nous a laissé comme héritage l’ensemble de ses travaux, de nombreux articles et ouvrages – et en particulier son Traité de droit aérien-aéronautique. Aujourd’hui encore, ses publications font autorité dans le domaine.”
Nous vous invitons à visionner l’entrevue-vidéo d’Anne-Karyne Matte. Elle y passe en revue la vie professionnelle et personnelle de son père avec comme toile de fond un Québec moderne en plein essor. Elle relate également les valeurs léguées à sa famille, les conseils qu’il prodiguait aux jeunes étudiants auxquels il était si attaché et ce qu’il souhaitait pour la société.
(Nous remercions Anne-Karyne Matte pour son aide dans la création de ce post)
Nous remercions Marie-Lucy Stojak, Lionel Alain Dupuis, Stéphane Lessard, Michel Berdnikoff d'avoir partagé les souvenirs de leur professeur ainsi que Dr Jacques et Geneviève Caen pour leur amitié d'une vie entière et leur contribution à l’entrevue.
