Des villes plus vertes et des citoyens plus heureux

L’École de l’environnement Bieler de McGill a dévoilé les lauréats de ses premières subventions Spark et Ignite de l’année. L’objectif des programmes de financement continu Spark et Ignite est de soutenir l’École dans sa mission de recherche de solutions interdisciplinaires à des problèmes environnementaux complexes. Parmi les projets retenus, deux ont trait aux mesures que nous pouvons prendre pour améliorer les villes canadiennes, rendre les milieux urbains plus verts et plus sains et améliorer le niveau de bonheur collectif partout sur la planète.  

Petits espaces verts 

Dans le cadre de leur projet Can Greenspace Composition and Placement Ameliorate Urban Heat Islands? (Est-il possible de réduire l’effet des îlots de chaleur grâce à la composition et à l’emplacement des espaces verts?) – qui leur ont valu une bourse Spark pouvant atteindre 7 500 $ – Raja Sengupta, professeur agrégé de géographie, et l’École Bieler s’associent à la professeure de génie civil Laxmi Sushama pour se pencher sur le phénomène urbain de mortalité liée à la chaleur à Montréal, attribuable à l’effet d’îlot de chaleur. Ce phénomène est de plus en plus présent dans le monde, surtout dans les zones où l’étalement urbain provoque une hausse des températures nocturnes et une augmentation de la consommation d’énergie associée au conditionnement de l’air. Le problème est particulièrement présent dans les centres-villes et les quartiers densément peuplés et moins aisés. 

« En plein cœur de la ville, les températures peuvent atteindre six ou sept degrés de plus que dans les autres quartiers, explique le professeur Sengupta. Dans les secteurs densément peuplés, comme dans l’est de la ville, la chaleur étouffante en période de canicule peut causer des décès. Il s’agit d’un problème climatique que nous avons créé et dont nous commençons à ressentir les répercussions graves. » 

Les espaces verts – notamment les parcs, les terrains boisés et les ruelles vertes de Montréal – peuvent faire baisser la température aux alentours, mais le lien entre la taille d’un espace vert et sa capacité à réduire l’effet d’îlot de chaleur ne fait pas consensus. Les professeurs Sengupta et Sushama combineront leurs forces en sciences de l’information géographique, en modélisation climatique à haute résolution et en injustice environnementale. Ils recueilleront les données produites par des dispositifs de mesure de l’humidité installés sur le campus du centre-ville et le campus Macdonald de McGill, et à proximité, et par des appareils mobiles. Ils auront ensuite recours à un modèle de microclimat urbain qui, espèrent-ils, pourra démontrer l’importance des petits espaces verts dans l’amélioration de la qualité de vie au sein de milieux urbains et denses. 

« Je cherche à prouver que les petits espaces verts ont des effets concrets, précise le professeur Sengupta. C’est plus facile de créer ces espaces que d’acheter et de convertir de grands lopins de terre. La multiplication des espaces verts autour de nous pourrait avoir d’importantes retombées positives, et pas uniquement sur la température. J’aimerais que la Ville de Montréal adopte une politique sur les petits espaces verts. Tout le monde veut connaître la valeur de ces espaces, et je veux pouvoir fournir des données. Si chacun de ces espaces pouvait faire baisser la température d’un degré, ça serait déjà bien. » 

De nouvelles normes pour des quartiers résilients 

Christopher Barrington-Leigh, professeur agrégé à l’École de l’environnement Bieler et à l’Institut des politiques sociales et de la santé de McGill, est économiste, et il s’intéresse à l’effet de facteurs sociaux, économiques et environnementaux sur le bonheur. Dans le cadre de son projet Street Network Sprawl and Environmental and Social Outcomes in Canada (Étalement des réseaux de rues et conséquences environnementales et sociales au Canada), pour lequel il a reçu une subvention Ignite pouvant atteindre 25 000 $, il examine les conséquences à long terme des décisions d’urbanisme sur les réseaux routiers et leurs répercussions sur notre quotidien. 

« À long terme, parmi les investissements qui influent sur le climat, lesquels sont les plus importants?, demande le Pr Barrington-Leigh. Les infrastructures énergétiques? Les immeubles résidentiels et commerciaux? Les réseaux routiers qui résultent du développement urbain constituent un élément extrêmement important que nous négligeons souvent. Les immeubles sont remplacés, mais ce n’est pas le cas des rues résidentielles, qui existent pendant des siècles. » 

Partout dans le monde, l’urbanisation se fait à un rythme si rapide que la configuration des rues en milieu urbain devient l’un des investissements les plus importants, les plus permanents et les plus ambitieux faits. 

« Nous créons des zones urbaines plus rapidement que jamais, à un rythme affolant qui ne se répétera jamais, affirme le professeur. La planète vit la dernière phase d’urbanisation, processus qui résulte des avancées technologiques et de la centralisation des ressources et qui ne se produira qu’une seule fois. » Il s’agit d’un processus d’une envergure exceptionnelle. Durant l’année précédant la pandémie, le déplacement de la population vers les zones urbaines a atteint un sommet qui ne sera probablement jamais égalé : un peu moins de 80 millions de personnes ont migré vers les villes en un an. Il faut donc bâtir, tous les cinq mois, l’équivalent de l’infrastructure routière et domiciliaire urbaine du Canada. 

Pour ce projet Ignite, Christopher Barrington-Leigh travaillera avec l’École de l’environnement Bieler et Kevin Manaugh, professeur agrégé au Département de géographie et spécialiste en équité dans les transports. Ils superviseront Fajle Rabbi Ashik, nouvel étudiant à la maîtrise, qui, à l’aide de données à haute résolution, évaluera les effets à long terme des types de réseaux routiers sur la vie et le bonheur. 

« Nous espérons définir de nouvelles normes pour la création de quartiers résilients et à l’épreuve du temps, en faisant le pari de la connectivité des rues et de l’adaptabilité afin que les villes bâtissent des quartiers à vocation mixte, propices à la marche et diversifiés, ajoute le professeur Barrington-Leigh. Nous nous intéressons à la forme urbaine pour une foule de raisons – santé, environnement, capital social et bonheur –, et cette simple contrainte imposée aux promoteurs garantirait de belles options pour les citoyens. » 

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