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Canneberges et bactéries pathogènes

Les dérivés de la canneberge pourraient freiner la propagation des bactéries pathogènes dans les dispositifs médicaux implantables
Publié: 15 July 2013

Au cours des dernières années, des études ont suggéré que la canneberge pourrait exercer un rôle préventif sur les infections urinaires en empêchant les bactéries d’adhérer à la paroi des voies urinaires grâce à des phytochimiques appelés proanthocyanidines. Jusqu’à récemment, toutefois, les mécanismes par lesquels la canneberge pourrait altérer le comportement des bactéries n’étaient toujours pas élucidés.

Des chercheurs du Département de génie chimique de l’Université McGill ont fait la lumière sur les mécanismes biologiques à l’origine du rôle protecteur éventuel de la canneberge contre divers types d’infections, dont les infections urinaires. Les résultats de deux nouvelles études dirigées par la professeure Nathalie Tufenkji sont venus s’ajouter au corpus de données permettant d’étayer les effets du petit fruit rouge sur les bactéries à l’origine des infections urinaires. Ces travaux permettent également de croire que les dérivés de la canneberge pourraient prévenir la colonisation bactérienne de dispositifs médicaux tels que les cathéters.

Publiés en ligne le mois dernier dans le Canadian Journal of Microbiology, les résultats obtenus par la professeure Tufenkji et les membres de son laboratoire révèlent que la poudre de canneberge inhibe la capacité à se propager de la bactérie Proteus mirabilis souvent incriminée dans les infections urinaires compliquées et elle empêche également sa propagation et son déplacement à la nage sur des plaques de gélose. Leurs travaux montrent également que l’augmentation des concentrations de poudre de canneberge réduit la production bactérienne d’uréase, une enzyme contribuant à la virulence des infections.

Ces résultats s’appuient sur des travaux précédents réalisés par les chercheurs du laboratoire de McGill qui avaient démontré que les produits dérivés de la canneberge inhibent les mouvements d’autres bactéries à l’origine d’infections urinaires. Une analyse pangénomique d’une variété d’E. coli uropathogène a démontré que l’expression du gène codant pour le filament flagellaire de la bactérie diminuait en présence de proanthocyanidines de canneberge.

Les résultats obtenus par l’équipe mcgilloise ont une portée significative, puisque les déplacements bactériens jouent un rôle clé dans la propagation des infections, les bactéries pathogènes nageant littéralement pour se disséminer dans les voies urinaires et échapper à la réponse immunitaire de l’hôte.

« Si l’apport de la canneberge sur les organismes vivants doit faire l’objet d’études plus poussées, les résultats que nous avons obtenus témoignent du rôle que la consommation de ces petites baies pourrait jouer dans la prévention des infections chroniques », affirme la professeure Tufenkji. « Chaque année dans le monde, on rapporte plus de 150 millions de cas d’infections urinaires, dont l’antibiothérapie demeure le traitement standard. Or, la résistance accrue aux antibiotiques témoigne de l’importance de mettre au point une nouvelle méthode de lutte contre ces infections. »

Les résultats d’une seconde étude réalisée récemment par la professeure Tufenkji, en collaboration avec Showan Nazhat, professeur à McGill et spécialiste des biomatériaux au Département de génie des mines et des matériaux, ont permis de conclure que les substrats de silicone enrichis de canneberge inhibaient la propagation de Proteus mirabilis. Publiés en ligne dans la revue scientifique Colloids and Surfaces B: Biointerfaces, ces résultats indiquent que les dérivés de la canneberge pourraient se révéler utiles pour freiner la propagation des bactéries pathogènes dans les dispositifs médicaux implantables, comme les cathéters, souvent associés aux infections urinaires.

« Compte tenu de la bioactivité démontrée de la canneberge, son utilisation dans les cathéters et autres dispositifs médicaux pourrait un jour se révéler extrêmement avantageuse pour la santé des patients », estime la professeure Tufenkji.

Ces nouvelles études ont été financées par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, le Programme des chaires de recherche du Canada, le Conseil de la canneberge du Wisconsin, l’Institut de la canneberge, le Fonds québécois de la recherche sur la nature et les technologies, et le Fonds de la recherche en santé du Québec.

Version intégrale de l’article publié dans le Canadian Journal of Microbiology :
http://www.nrcresearchpress.com/doi/abs/10.1139/cjm-2012-0744#.UctRHjvqlLc

Version intégrale de l’article publié dans Colloids and Surfaces B: Biointerfaces :
http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0927776513002348

IMAGE: Prof. Nathalie Tufenkji dans son laboratoire avec Ché O’May (à droit), stagiaire postdoctoral. CRÉDIT: Owen Egan

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