Avant de traiter une maladie, il faut la comprendre. Cela implique de déceler les facteurs environnementaux extrinsèques, par exemple l’exposition à des facteurs de risque comme l’alimentation et le mode de vie, et les facteurs intrinsèques de la maladie – les interactions complexes des facteurs génétiques. À l’aide de puissants outils bio-informatiques, les scientifiques du Centre de recherche de l’Université McGill sur les maladies infectieuses et inflammatoires chroniques (MRCCT), au Complexe des sciences de la vie, examinent les interrelations entre ces éléments. Leurs travaux mènent à la découverte de voies, de gènes et de protéines en cause dans l’apparition, la progression et l’issue de différentes maladies. Ils jettent ainsi les bases essentielles à la mise au point de nouveaux modes de prévention et de traitement de ces affections.
« Le Complexe des sciences de la vie a donné à un groupe de chercheurs de diverses disciplines – biochimie, génétique, microbiologie, physiologie, bio-informatique – une occasion unique de collaborer », explique la professeure de génétique humaine Silvia Vidal, directrice du MRCCT. «La qualité des installations scientifiques et animalières a accéléré le recrutement de jeunes chercheurs et stagiaires de grand talent. Dans ce milieu propice, nous avons pu lancer des projets collaboratifs ambitieux qui ont permis de caractériser les fondements génétiques de la susceptibilité de l’hôte à l’infection et d’identifier de nouveaux gènes et mécanismes dans des modèles murins de maladies infectieuses humaines. On recherche maintenant des applications potentielles de certaines de ces découvertes non seulement dans le traitement des infections graves, mais aussi des maladies inflammatoires.»
Trois percées majeures en matière de maladies infectieuses et inflammatoires chroniques
1. Interrompre la mort cellulaire pour sauver l’hôte: les recherches de la professeure adjointe Maya Saleh, du Département de microbiologie et d’immunologie, visent à faire la lumière sur les voies de la mort cellulaire et le lien entre la mort cellulaire et l’inflammation. Par le passé, on croyait que tous les dommages causés par une maladie infectieuse provenaient de l’agent pathogène qui tuait les cellules. Or, on réalise aujourd’hui que les dommages sont causés en bonne partie par des réponses immunitaires exagérées. La Pre Saleh et l’équipe de son laboratoire cherchent à comprendre les interrelations entre la réponse immunitaire innée, la mort cellulaire et l’inflammation, dans l’espoir d’ouvrir la voie à de nouvelles approches thérapeutiques pour des affections aussi diverses que le cancer, la grippe et les maladies inflammatoires de l’intestin.
Cell Host and Microbe. 15 January 2014. doi: 10.1016/j.chom.2013.12.003
2. Un type de cellule rare au potentiel antigrippal: Le professeur agrégé Jörg Fritz, du Département de microbiologie et d’immunologie, a caractérisé un nouveau type de cellules dans les poumons de la souris, les cellules lymphoïdes innées de type 2 (ILC2). Nous pouvons tirer de ces cellules rares des leçons importantes sur leur mode de développement et leur façon de modifier leur réponse immunitaire au virus de la grippe. Les ILC2 semblent en effet contribuer à maintenir l’intégrité de la barrière épithéliale respiratoire et l’homéostasie des tissus pulmonaires après les infections virales. À l’inverse de ces fonctions protectrices, les ILC2 peuvent aussi déclencher des réponses immunitaires dérégulées qui peuvent aggraver l’infection. Une meilleure compréhension de ces deux types de réponses des ILC2 pourrait ouvrir des avenues potentielles de prévention et de traitement des infections respiratoires, qui représentent un fardeau immense à l’échelle mondiale.
Nature Immunology. 2016 Jan;17(1):65-75. doi: 10.1038/ni.3308. Epub 2015 Nov 23. Type I interferon restricts type 2 immunopathology through the regulation of group 2 innate lymphoid cells.
3. La cystéamine contre le paludisme pharmacorésistant: Le professeur Philippe Gros, du Département de biochimie, et son équipe étudient la réponse à la cystéamine (un médicament approuvé pour le traitement d’une maladie rénale appelée cystinose néphropathique) chez les souris infectées au Plasmodium falciparum, le parasite à l’origine du neuropaludisme. L’usage prometteur de ce médicament comme adjuvant de l’artémisinine (un antipaludique auquel le parasite a développé une résistance) fait maintenant l’objet d’essais cliniques. Autre bienfait: lorsqu’elle est combinée à la cystéamine, l’artémisinine peut être administrée en doses plus faibles. Cette découverte pourrait profiter à des millions de personnes, en particulier les enfants, qui sont le plus touchés par le paludisme.
Malaria Journal.2016 May 6;15(1):260. doi: 10.1186/s12936-016-1317-3.