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De l’or sous le plancher océanique? L’eau de mer y serait pour quelque chose

En analysant des roches anciennes, des chercheurs de l’Université McGill ont trouvé un ingrédient étonnant dans des veines aurifères
Publié: 3 July 2024

Pour savoir où trouver de l’or et comment l’extraire dans le respect de l’environnement, il est crucial de comprendre comment ce métal se forme. Des chercheurs de l’Université McGill sont parvenus à répondre à une question que les géologues se posaient depuis longtemps, et leurs conclusions pourraient mener à la découverte de gisements.

Les chercheurs se sont rendus à la mine d’or Brucejack, dans le nord-ouest de la Colombie-Britannique, pour étudier de très anciennes roches minéralisées et recueillir des échantillons. Aujourd’hui situé sur la surface terrestre en raison de l’activité tectonique des plaques, le gisement s’est formé dans un arc volcanique sous-marin, il y a environ 183 millions d’années. Après avoir analysé les échantillons à l’Université McGill et à l’Université de l’Alberta, les chercheurs ont constaté que de l’eau de mer s’était combinée à des fluides minéralisateurs dans la croûte terrestre pour former de l’or.

« Ces roches, qui remontent à l’époque du Jurassique inférieur, étaient emprisonnées dans des formations sédimentaires et volcaniques », explique l’un des coauteurs de l’étude, Anthony Williams-Jones, professeur titulaire de la Chaire Logan de géologie et de géochimie au Département des sciences de la Terre et des planètes de l’Université McGill. « En utilisant la spectrométrie de masse à haute résolution, nous avons réussi à décoder leur signature chimique unique. Trouver des dépôts d’or formés à partir d’eau de mer, c’était inédit et inattendu. »

Duncan McLeish, boursier postdoctoral à l'Université McGill, sur le terrain de la mine Brucejack. (Crédit : Kevin Ng)

Un phénomène semblable au caillage du lait

En 2021, l’équipe de l’Université McGill avait déjà fait une découverte offrant des pistes de réponse. Les chercheurs avaient constaté que les nanoparticules d’or se combinaient pour former des dépôts d’or à teneur élevée, un peu comme les protéines s’agglutinent pour créer des grumeaux lorsque le lait surit.

« Au cours de notre nouvelle étude, nous avons découvert que les ions de sodium présents dans l’eau de mer jouaient le même rôle que l’acide dans le caillage du lait en provoquant le regroupement des nanoparticules d’or en veines », explique l’auteur principal de l’étude, Duncan McLeish, boursier postdoctoral au Département des sciences de la Terre et des planètes de l’Université McGill.

La présence d’eau de mer laisse entendre que des veines aurifères pourraient se former dans le fond de l’océan. Des gisements d’or insoupçonnés pourraient donc exister dans les arcs volcaniques sous-marins et les fosses océaniques, où les conditions sont idéales, selon l’étude publiée dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America.

L'équipe de recherche de McGill étudie une veine minéralisée (contenant de l'or) sous terre à la mine Brucejack. (Crédit : Duncan McLeish)

Présence d'or à très haute teneur dans la mine de Brucejack. (Crédit : Duncan McLeish)

L’océan, un filon prometteur

Considéré depuis toujours comme un métal précieux, l’or est devenu un métal essentiel puisqu’il est utilisé dans les technologies d’énergie verte, les appareils électroniques et le matériel médical, notamment. Le minerai extrait des mines terrestres est souvent pauvre et nécessite un traitement considérable, associé à un coût environnemental important. En revanche, l’extraction d’éventuels dépôts à teneur élevée découverts dans les profondeurs marines réduirait l’empreinte écologique de l’exploitation aurifère, selon les chercheurs.

« Nos observations donnent à penser que les fonds marins pourraient favoriser la formation de concentrations d’or rares, mais spectaculaires, comme celles que nous avons trouvées dans les veines à teneur élevée. L’exploitation des gisements sous-marins retient de plus en plus l’attention. Notre étude évoque la possibilité que la croûte océanique renferme de nombreuses ressources nécessaires au verdissement du secteur énergétique, et en quantités insoupçonnées », précise le Pr Williams-Jones.

Jim Clark, associé de recherche à McGill, Kevin Ng, étudiant au doctorat, un géologue de Newmont Corp., et Anthony Williams-Jones, professeur à McGill, étudient un filon d'or minéralisé à la mine Brucejack. (Crédit : Duncan McLeish)

L’étude

L’article « Extreme shifts in pyrite sulfur isotope compositions reveal the path to bonanza gold », par McLeish, D. F., Williams-Jones, A. E., Clark, J. R. et Stern, R. A., a été publié dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS) en mai 2024.

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