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Des méthodes de recherche déficientes exagèrent la prévalence de la dépression

Une nouvelle étude conclut que les chercheurs surestiment souvent la prévalence de la dépression par l’utilisation d’outils de dépistage qui ne sont pas conçus pour diagnostiquer la dépression
Publié: 18 January 2018

Une trop grande confiance envers les questionnaires de dépistage autodéclarés, où les patients définissent essentiellement leur propre état, plutôt que des entretiens diagnostiques réalisés par un professionnel de la santé, s’est traduite par une surestimation de la prévalence des personnes dépressives dans beaucoup d’études de recherche — souvent de deux à trois fois plus. Ces résultats sont basés sur une étude publiée dans le Journal de l’Association médicale canadienne. L’étude a démontré que plus de 75 % des recherches récentes sur la prévalence de la dépression étaient fondées exclusivement sur des questionnaires remplis par les patients.

« Ces études donnent une idée fausse des taux réels de dépression, qui apparaissent souvent beaucoup plus élevés qu’en réalité, ce qui fait en sorte qu’il est très difficile d’allouer les ressources appropriées aux problèmes rencontrés par les patients », a déclaré le docteur Brett Thombs, de l’Institut Lady Davis de l’Hôpital général juif et de l’Université McGill, l’auteur principal de l’étude. « Les questionnaires d’auto-évaluation sont destinés à être utilisés comme une évaluation initiale pour ratisser large et identifier les personnes qui peuvent être aux prises avec des problèmes de santé mentale. Cependant, nous devons effectuer une évaluation plus approfondie pour déterminer le diagnostic approprié et si d’autres problèmes doivent être abordés.

« Une autre préoccupation », a-t-il ajouté, « est que les questionnaires d’auto-évaluation ont tendance à exagérer le plus la prévalence lorsque la prévalence réelle est faible, mais le moins lorsque la prévalence réelle est élevée. Par conséquent, les études qui utilisent ces méthodes brouillent les différences entre les patients qui sont très vulnérables à la dépression et ont besoin de plus de ressources en santé mentale et ceux qui ne le sont pas. » Le docteur Thombs et son équipe ont démontré qu’un questionnaire d’auto-évaluation type surestimait la prévalence de la dépression de 10 à 15 % lorsque la prévalence réelle était inférieure à 10 %, mais seulement d’environ 5 % lorsque la prévalence réelle était de 20 %. Environ 5 % des Canadiens vivent un épisode de dépression au cours d’une année donnée, selon les méthodes de diagnostic appropriées.

À titre d’exemple, le docteur Thombs et ses collègues citaient une étude de synthèse influente qui intégrait les résultats de plus de 160 études, dont la plupart utilisaient des questionnaires, et concluait que 27 % des étudiants en médecine étaient atteints de dépression. L’équipe du docteur Thombs a noté que, dans les quelques études qui utilisaient des outils de diagnostic appropriés, le taux était de 9 %, soit le taux auquel on devrait s’attendre chez les personnes âgées de dix-huit à vingt-quatre ans, qu’elles soient ou non des étudiantes en médecine. « Être étudiant en médecine est stressant et nous devrions fournir de meilleures ressources pour que nos étudiants puissent mieux s’y adapter », a déclaré le docteur Thombs. « Leur attribuer une étiquette de dépression ne les aidera pas et réduira même leurs chances d’obtenir le genre de soutien dont ils ont besoin. »

Selon le docteur Thombs et son équipe, l’une des raisons pour lesquelles les chercheurs utilisent des questionnaires d’auto-évaluation est que les entretiens diagnostiques sont longs et coûteux à administrer.

« De plus », dit le docteur Thombs, « les études ayant des résultats spectaculaires ont tendance à être acceptées par les revues les plus influentes et à attirer davantage l’attention du public que les études ayant des résultats plus modestes. Cela aussi peut encourager certains chercheurs à présenter les résultats provenant des questionnaires au lieu de mener des entretiens diagnostiques appropriés. »

 

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