Science ouverte et magnétoencéphalographie

La norme BIDS appliquée à la magnétoencéphalographie imprimera un nouvel élan à la recherche

L’élaboration, par un consortium international dirigé par des chercheurs du Neuro, d’une nouvelle norme en matière d’organisation des données en neurosciences favorisera le partage des données obtenues par magnétoencéphalographie (MEG) et par électrophysiologie multimodale, une étape importante vers l’objectif que s’est donné le Neuro de devenir un véritable chef de file dans le domaine de la science ouverte.

Les chercheurs en neurosciences qui œuvrent partout dans le monde produisent chaque année des quantités astronomiques de données, mais celles-ci ne sont utiles que si elles sont accessibles et interprétables. L’ajout d’une telle quantité d’information chaque jour fait de la gestion des données un véritable enjeu, en raison notamment du fait que les neuroscientifiques organisent généralement leurs données d’une façon qui leur est propre et qui diffère bien souvent de la méthode utilisée non seulement par leurs collègues d’autres institutions, mais également par d’autres membres de leur propre laboratoire.

Une initiative appelée Brain Imaging Data Structure (BIDS) a récemment été mise sur pied afin de simplifier l’organisation des données d’imagerie par résonance magnétique (IRM). Les études d’IRM comportent souvent plusieurs types d’images, et il n’existait encore aucun consensus sur la façon d’organiser les vastes corpus de données qu’elles génèrent. Les scientifiques qui souhaitaient reproduire certains résultats à partir des données d’un collègue perdaient un temps précieux à réorganiser ces dernières afin de pouvoir les utiliser de façon appropriée. La méthode d’organisation des données BIDS a proposé une façon plus simple et standardisée de classer les dossiers de données afin que l’information soit interprétable par l’utilisateur et exploitables par ordinateur.

Une nouvelle initiative internationale permet maintenant à BIDS d’intégrer les données obtenues par MEG. L’appareil utilisé pour la MEG mesure le champ magnétique résultant de l’activité électrique des cellules cérébrales, ou neurones. Même si ce champ magnétique est extrêmement faible, l’appareil peut le détecter et le suivre à l’échelle de la milliseconde.

«Au Neuro, les chercheurs ont recours à la MEG pour étudier la dynamique des systèmes cérébraux intervenant dans la cognition et la perception via des études sur le langage, le vieillissement, la vision, l’audition et la mémoire. On y a également recours pour diverses études cliniques en neurosciences portant sur des volontaires atteints d’épilepsie ainsi que pour de nouvelles études sur la maladie d’Alzheimer et l’autisme», souligne SylvainBaillet, chercheur principal au Neuro et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en neurosciences et analyse des mégadonnées. Il est également l’auteur, en compagnie de chercheurs internationaux, d’un article intitulé «MEG-BIDS, the brain imaging data structure extended to magnetoencephalography», publié récemment dans la revue Scientific Data.

La MEG peut mesurer extrêmement rapidement l’activité cérébrale, au moins à la milliseconde près, ce qui constitue à la fois un avantage et un défi, selon le PrBaillet.

«Il est vrai que nous pouvons obtenir rapidement des clichés uniques dans le domaine de l’imagerie cérébrale, mais la quantité de données générées au cours d’une expérience de 30minutes sur une seule personne est considérable, de l’ordre de trois gigaoctets par minute d’activité cérébrale. L’interprétation plus précise des données constitue notre principal axe de recherche, et le regroupement des sources de données de l’ensemble des chercheurs est un moyen d’obtenir des résultats plus solides.»

Quelque 300centres de recherche et de soins cliniques utilisent la MEG dans le monde. Pourtant, ils n’ont recours à aucune méthode standardisée commune pour l’organisation ni des données brutes, soit les données de base enregistrées par l’appareil, ni des métadonnées essentielles, soit l’information sur les détails de l’étude, les paradigmes de recherche ainsi que les renseignements démographiques généraux et anonymes sur les participants.

La norme BIDS appliquée à la MEG (MEG-BIDS) permet d’organiser les données et les métadonnées de façon standardisée, quel que soit le format des données brutes spécifique à l’appareil utilisé. Les tentatives d’harmonisation antérieures ont échoué, car les concepteurs tentaient d’imposer un format de données commun différent de l’original. Elles se sont également heurtées à un obstacle de taille: les formats de données propriétaires des fournisseurs d’appareils.

«Nous avons décidé d’emprunter une autre voie», explique SylvainBaillet. «Nous proposons de conserver les données brutes telles qu’elles sont générées par chaque appareil. Toutefois, tous les laboratoires stockeront ces données en respectant la même méthode– simple, mais systématique– pour l’organisation des dossiers et des sous-dossiers sur le disque dur.»

MEG-BIDS règle le problème de l’organisation des données électrophysiologiques en standardisant la méthode utilisée pour les stocker, et ce, pour tous les laboratoires de tous les pays.

«Mes données seraient organisées de la même façon que celles d’un chercheur qui travaille en Norvège, aux États-Unis ou ailleurs dans le monde», explique le PrBaillet. «Cette façon de procéder facilite l’échange et l’interprétation des données.»

La rapidité avec laquelle les utilisateurs de la MEG adopteront la norme MEG-BIDS dépend de deux facteurs.

«Nous pouvons déjà mesurer l’influence d’un de ces facteurs. La compatibilité avec MEG-BIDS pour la lecture et l’analyse des données est offerte par plusieurs des principales boîtes à outils gratuites de logiciels libres», souligne SylvainBaillet, qui coordonne le développement à l’échelle internationale de Brainstorm, logiciel libre compatible avec MEG-BIDS pour l’électrophysiologie multimodale, qui compte environ 20000utilisateurs.

L’autre facteur mettra plus de temps à se concrétiser. En effet, il faudra convaincre les partenaires du secteur privé et les fournisseurs d’adopter la norme afin que leurs appareils puissent générer des données stockables dans MEG-BIDS immédiatement après avoir été obtenues.

MEG-BIDS est en parfaite adéquation avec la politique de science ouverte que le Neuro a adoptée en 2016 et qu’il s’emploie à promouvoir activement au sein du milieu scientifique. Conformément aux principes de la science ouverte, les chercheurs du Neuro peuvent communiquer librement leurs données et renoncer à présenter des demandes de brevets. Ce faisant, ils favorisent la diffusion plus rapide et plus large des données scientifiques afin que les résultats de la recherche puissent se traduire par des applications cliniques dont bénéficieront les patients.

«Lors de la planification et du développement de MEG-BIDS, nous cherchions à former un consortium composé de spécialistes en recherche fondamentale travaillant sur le terrain», affirme le PrBaillet. «Le processus s’est essentiellement déroulé sur le Web, dans des forums de discussion. Nous sommes parvenus à un consensus, tous ensemble, dans le cadre d’une approche ascendante. Le résultat est le fruit d’une collaboration internationale plutôt que d’un processus descendant dicté par une seule institution.»

Fait inusité, le PrBaillet et ses collègues d’autres pays ont réalisé en 2017 un sondage auprès de78centres internationaux afin de mesurer leur intérêt pour l’initiative MEG-BIDS. Plus de 97pour cent des répondants ont manifesté leur intérêt pour l’élaboration d’une méthode standardisée pour l’organisation des données obtenues par MEG et étaient disposés à essayer celle proposée par l’initiative MEG-BIDS. Selon SylvainBaillet, la participation tant des neuroscientifiques que des experts en mégadonnées a permis de mettre au point un outil utile à tous.

«Si nous avions fait appel uniquement à des informaticiens, l’outil mis au point n’aurait pas eu autant d’intérêt pour les neuroscientifiques, et vice-versa», souligne le PrBaillet. «Je suis heureux que nous ayons pu en arriver à un consensus sans avoir à nous déplacer pour nous rencontrer. Nous avons effectué la partie la plus difficile du travail sur le Web, ce qui prouve qu’aujourd’hui, la science transcende les disciplines et les frontières géographiques.»

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Le Neuro (L'Institut-hôpital neurologique de Montréal) - un institut de recherche et d’enseignement bilingue de McGill, qui offre des soins de haut calibre aux patients - est la pierre angulaire de la Mission en neurosciences du Centre universitaire de santé McGill. Nous sommes fiers d’être une institution Killam, soutenue par les fiducies Killam.

 

 

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